Depuis 2005, des personnes se réunissent le 7 janvier de chaque année pour se souvenir de Laye Condé et des autres personnes affectées par la distribution de vomi. Cette commémoration a toujours été une expression de protestation. Très tôt, des activistes ont demandé la création d’un lieu de mémoire. Un tel lieu de mémoire s’adresse d’une part aux personnes affectées et peut ainsi contribuer à leur visibilité et à la reconnaissance de l’injustice qui leur a été faite individuellement. D’autre part, un lieu de mémoire est à la fois un moyen et une expression de la réparation des injustices sociales.
En 2014, l’initiative en mémoire de Laye Alama Condé a entrepris une première tentative concrète de réalisation d’un lieu de mémoire. En collaboration avec les deux artistes Doris Weinberger et Jule Körperich, une proposition concrète a été soumise aux autorités culturelles. Cette première tentative a permis de faire connaître l’idée d’un lieu de commémoration à un plus large public et d’étayer la demande de l’initiative auprès des autorités, mais n’a pas débouché dans un premier temps sur une réalisation concrète.
Dans une étape suivante, l’initiative a lancé en 2017, à l’occasion du 12e anniversaire de la mort de Laye Condé, un lieu de commémoration mobile qu’elle avait elle-même conçu. Depuis, celui-ci a pu être visité et écouté dans différents endroits et lieux culturels de Brême.
En accompagnement d’un débat au Parlement de Brême, l’initiative a élaboré un document : „Lieu de mémoire pour Laye Condé et 13 ans de distribution de vomitifs à Brême. Des Questions, des malentendus, des arguments“ . Ce document fait référence à quelques questions récurrentes concernant un éventuel lieu de commémoration.
Suite à la pression publique persistante de la société civile, les Verts, la Gauche et le SPD se sont prononcés en juillet 2019 dans leur accord de coalition pour la création d’un lieu de mémoire. Fin 2020, le Parlement de Brême a finalement décidé à la majorité, à la demande de ces partis de gouvernement, de « créer un lieu permanent pour commémorer les événements et rappeler que personne ne doit être soumis à un traitement inhumain et dégradant, subir des dommages durables ou même perdre la vie sous la surveillance de la police ».
Le lieu de commémoration sera réalisé sur une petite place à côté de la „Gerhard-Marcks-Haus“.
L’initiative a élaboré un autre document après la décision : „Réflexions et points clés sur le lieu de commémoration décidé“. Le document aborde la question de savoir à qui exactement un lieu de mémoire peut être dédié.
En 2021, les autorités culturelles ont décidé d’organiser un concours artistique et de former un comité de sélection qui décidera lequel des projets présentés sera effectivement réalisé.
Ce qui est unique à Brême jusqu’à présent, c’est que cette commission de sélection n’a pas été formée d’expert.e.s en art ou de représentant.e.s de la politique et des autorités, mais qu’elle est composée de personnes intéressées de la société urbaine de Brême, dont beaucoup ont fait l’expérience du racisme (anti-noir) et de la violence policière. L’autorité culturelle avait fait de la publicité pour cela en envoyant une lettre invitant de manière ciblée à participer au comité de sélection en posant les questions suivantes :
« Nous recherchons des personnes qui se sentent concernées par ces questions :
- Avez-vous vous-même des expériences avec le racisme et la discrimination à Brême – et donc un regard pour la perspective particulière du lieu de mémoire ?
- Faites-vous vous-même l’expérience d’être considéré comme « étranger » et, le cas échéant, d’être désavantagé ?
- Connaissez-vous peut-être des personnes qui ont été victimes d’un vomissement ?
- Avez-vous vous-même été affecté.e par une intervention à l’aide d’un vomitif ? »
Le 7 décembre 2022, le sénateur pour la culture a finalement publié l’appel d’offres pour un concours artistique. Les artistes (visuels) du monde entier doivent manifester leur intérêt jusqu’au 28 février 2023.
Texte de l’appel d’offres en ENGLISH, ALLMAND, ESPAGNOL.
„Thématique du contenu du lieu de commémoration :
La tâche du concours est la conception artistique du nouveau lieu de commémoration à droite à côté de la Gerhard-Marcks-Haus à Brême. Ce faisant, le lieu de commémoration doit au moins tenir compte de ces trois points.
Le lieu de mémoire sera un lieu de discussion et de dialogue pour tous les habitant.e.s de la ville. Le lieu doit devenir un lieu de mémoire pour tous les citoyen.ne.s.
- Le lieu de commémoration rappelle le cas de Laye Alama Condé.
- Le lieu de mémoire rappelle les personnes qui ont été exposées à l’administration forcée de vomitifs sous la tutelle de l’État.
- Le lieu de mémoire doit être un lieu de réflexion sur le racisme anti-noir(e)s (racisme).
L’œuvre d’art peut, entre autres, faire référence aux sujets suivants:
- L’administration de vomitifs comme torture et le recours à la violence.
- La violence policière et la pratique raciste.
- La violence raciste, elle existe toujours aujourd’hui dans les services de l’État.
- Rendre hommage aux victimes anonymes.
- Renforcer les personnes qui ont vécu ces expériences, renforcer la motivation à ne pas rester seul et à se révolter contre les abus (empowerment).
- Le lieu de commémoration peut devenir un lieu de séjour ainsi qu’un lieu d’interaction et de dialogue.
- Les informations sur l’œuvre d’art devraient être disponibles sous forme numérique et analogique, le multilinguisme devrait être pris en compte (au moins anglais, allemand et français).
Il est possible de penser à toutes les victimes du racisme.
Ce concours est ouvert aux artistes plasticien.ne.s de toutes nationalités. Tou.te.s les artistes sont invité.e.s à poser leur candidature. Nous invitons surtout les artistes qu